mercredi 11 mai 2011

17:59 Fête du premier mai: Les oubliés du code du travail


Jeudi premier mai, fête du travail, les travailleurs des secteurs publics et privés vont battre le pavé contre la hausse des prix, pour l’augmentation des salaires. Au même moment, les m’bindannes et boys (domestiques hommes et femmes) seront au boulot. Comme des milliers d’autres travailleurs mauritaniens, ils vivent en marge du code du travail et n’ont pas droit à la fête du premier.

Chaque matin, Aida et des dizaines d’autres femmes quittent les quartiers Sebkha et El Mina, traversent la zone militaire et prennent la route de Nouadhibou pour se rendre au fond de Tevragh Zeina. Elles sont employées dans les villas luxes et spacieuses dont rêvent tous le mauritaniens. Aida n’a pas de congé. Elle se repose un vendredi sur deux. Elle travaille de huit heures à dix huit heures. Dix heures par jour, soit soixante dix heures par semaine. Ses tâches ne son pas définies: le linge, la vaisselle, les courses, le thé…



La contrepartie de cette traite: quinze mille ouguiyas. Moins que le SMIG. C’et pourquoi, pour se rendre chez ses employeurs, elle ne peut prendre le taxi. Autrement, les quinze mille y passeraient vite. Aida peut être virée à tout moment. Elle peut être accusée de vol. Comme toutes les m’bidane, elle évolue en marge du code du travail. Elle n’a pas droit au repos hebdomadaire, au congé, au premier mai…

Elle n’a même pas le droit de tomber malade. Quand une m’dindanne chope une fièvre, ses jours d’absence sont automatiquement retranchés de son « salaire ». Une vie à la limite de la traite. Mais, le combat pour la survie, ça conduit presque toujours à mettre la dignité, l’amour propre en veilleuse. Chaque matin, en face de l’Eglise de Nouakchott, des dizaines de femmes, candidates à l’esclavage, attendent, sous le soleil, l’arrivée des contremaîtres.

Elles prennent d’assaut les voitures qui s’arrêtent. «Je suis ici depuis un mois. Je n’ai pas trouvé un employeur.» Dit l’une d’elles. « Non seulement nous poirotons ici toute la journée sans trouver du travail, mais certains nous regardent comme des prostituées prêtes à se faire embarquer.» Ajoute une autre.

Des femmes seules debout dans la rue, ça donne des idées à certains. Une autre domestique de l’église raconte : « L’autre jour, un homme est venu ici pour chercher une m’bindanne. Nous avons discuté du prix par moi et du travail que je devais faire. Je suis montée dans sa voiture pour qu’il me montre sa maison. Je devais commencer le travail le lendemain. Arrivée devant sa porte, il m’a dit que je pouvais venir le voir deux fois par semaine et seulement la nuit. J’ai compris ce qu’il cherchait. J’ai ouvert la portière et je suis retournée à l’Eglise.» C’est humiliant. Mais, c’est le prix à payer pour avoir la chance de sortir du chômage pour s’engager dans la servilité.

Zones grises, zones d’exploitation

Les domestiques évoluent dans les zones grises propices à toutes sortes d’exploitation. Des zones grises appelée pudiquement informel.

Les travailleurs en marge du code du travail, ce n’est pas seulement dans les ménages. En Mauritanie, il existe des boite du secteur privé, avec toutes les apparences de la légalité, dont le personnel exercent en marge du code du travail. Ca coûte moins cher et c’est plus facile à mettre à la porte. Certaines grandes banques de Nouakchott seraient de grandes employeuses de travail au noir. Elles auraient des employés sans contrat de travail, donc sans aucune couverture sociale et sans aucun droit.

Les établissements scolaires privés de Nouakchott sont enregistrés au ministère de l’éducation nationale. Leur personnel a le même traitement que celui des m’bindanne. Les enseignants qui exercent en même temps dans le public et le privé ne se plaignent pas trop. Ils jouissent des garanties offertes par la fonction publique.

Par contre, ceux qui n’exercent que dans les écoles privées sont embauchés comme les domestiques. Eux aussi n’on pas le droit de tomber malade. Chaque heure d’absence, quelque soit le motif, n’est pas payée. Il en est de même des week end, des jours fériés…Les élèves de ces écoles privées, eux, payent les neufs mois de scolarité. Résultat : la masse salariale des écoles est réduite au minimum. En même temps, le nombre d’élèves inscrits et les prix des cours grimpent chaque année.

Khalilou Diagana
khalioubi@yahoo.fr
Le Quotidien de Nouakchott

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